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03 avril 2015

Guillaume Ominetti Actuaire associé IA, responsable de la protection du capital du groupe SCOR

Interview

« Les risques émergents sont un enjeu fondamental pour notre industrie »

l’actuariel : Comment aborder les problématiques de risques émergents ?

Guillaume Ominetti : L’expression « risques émergents » regroupe, d’une part, les risques dont le fait générateur est entièrement nouveau, comme les nanotechnologies, d’autre part, les risques qui changent de dimension ou se développent mais dont le fait générateur existe depuis longtemps. Citons les éruptions solaires : pouvant endommager satellites et réseaux électriques et entraîner un black-out généralisé, elles ne sont devenues un risque majeur que dans les dernières décennies. Souvent évolutifs, les risques émergents correspondent aux unknown unknowns car il y a incertitude sur leur caractérisation même. Ils sont un enjeu fondamental pour notre industrie car, en plus de constituer des menaces, ils peuvent être des sources d’opportunités potentielles, en élargissant le spectre des risques assurables. C’est le cas du risque cyber.

L’actuariel : Comment modélise-t-on ces risques ?

 G.O. : La sévérité et la fréquence de survenance sont les deux composantes de la modélisation d’un risque. Pour un risque émergent, il paraît plus naturel d’étudier d’abord la sévérité. Dans cette perspective, SCOR développe régulièrement des scénarios extrêmes spécifiques dits « footprint ». Par exemple, afin de tester la résilience de la solvabilité du groupe à des scénarios extrêmes survenus par le passé, nous répliquons des catastrophes naturelles historiques, comme le séisme de San Francisco de 1906, pour évaluer leurs conséquences à l’aune des valeurs assurées actuelles. De tels scénarios footprint sont aussi envisagés pour les risques émergents. La modélisation consiste alors en une analyse dite « à dire d’expert ».

l’actuariel : Que nous enseigne cette modélisation ?

 G.O. : Les scénarios footprint constituent un outil complémentaire au modèle interne pour l’évaluation des risques. Ils nous permettent de contrôler nos cumuls entre les différentes branches et classes d’expositions sur des événements concrets. Ils offrent aussi une opportunité pour affiner nos modélisations actuelles. Ainsi, certaines catastrophes naturelles ne sont pas ou sont mal prises en compte par les modèles disponibles sur le marché. C’est le cas des tsunamis consécutifs aux séismes sous-marins. Chez SCOR, nous avons réalisé nos propres analyses pour intégrer l’impact de la vague, en estimant son ampleur puis en la superposant au relevé topographique du littoral touché et à la distribution de nos expositions le long de celui-ci. Pour les risques émergents, l’étude ad hoc d’un événement précis peut être une première étape vers la construction d’un modèle, c’est-à-dire d’un schéma d’évaluation sur l’ensemble des événements possibles.

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